26/08/2020
se jeter à l'eau sans savoir nager, ...
Je vous préviens, je vais encore vous parler de ma fille aînée. Ceux que ça ennuie n'auront qu'à s'abstenir de lire.
Avant le confinement ma fille était fort déprimée. Pendant le confinement, elle a commencé à se détendre et se sentir mieux. Après, elle a suivi un coaching "Be extraordinary" sur internet qui a eu raison de son état dépressif. Il s'agissait, si j'ai bien compris, de trouver et d'orienter sa vie vers ce qu'on voulait vraiment. Bien, bien !
Au mois d'août, elle était en congé. Elle aurait voulu que je l'accompagne quelques jours en Hollande, dans un village de vacances où nous sommes déjà allés un certain nombre de fois. Finalement, les conditions sanitaires, les zones rouges, les risques, ont fait qu'elle a abandonné l'idée.
Ensuite, elle voulait faire des excursions d'un jour, mais elle n'a plus rien proposé. Je l'ai relancée quelquefois sans qu'elle réagisse. Elle a donc passé un mois de vacances dans son appartement avec Picolo qui a passé son temps sur les jeux en ligne et les vidéos de youtubeurs. Pas une seule balade dans le bois près de chez elle. Pas une seule sortie ou visite de quoi que ce soit.
Hier, elle nous invite à manger. Elle parle de toutes les informations qu'elle a glanées sur le net, scientifiques, spirituelles, un peu de tout, un peu orientées complotisme. Elle nous annonce qu'à partir du lendemain, ils vont se mettre au végétarisme. Bien, bien !
Je vois que Picolo en a marre de nos discussions et je propose qu'on s'arrête là. Comme à chaque fois, la soirée se termine pour elle et moi à papoter sur la terrasse pendant que Picolo et son Papy restent dans le salon.
C'est là qu'elle m'annonce ce qui va me scotcher complètement. Outre son désir bien légitime et récurrent de se débarrasser de son addiction à la cigarette (et à ce qu'elle y saupoudre), elle a DÉCIDÉ ce qui suit :
- retirer Picolo de l'école et lui donner cours elle-même.
- quitter son travail
- revendre son appart et acheter un petit chalet sur un grand terrain.
- travailler avec un "groupe" que je suis incapable de qualifier clairement. Il s'agit de propager sur le net des informations, des pistes destinées à changer la société, son mode économique et social, ses valeurs spirituelles, etc. Elle m'a précisé que ce n'était pas une secte. Sur le moment, je n'y avais pas pensé, mais après coup, si ! Une secte dont le leader est un jeune homme qui selon elle est tellement rayonnant, tellement empathique, tellement doux, avec un si beau regard qu'on se demande si elle n'en est pas amoureuse. Un gourou quoi ! D'autant plus qu'elle pratique avec lui, par écran interposé, la méditation (ce qui en soi est une bonne chose), mais qu'il préconise aussi le jeûne (ce qui isolément n'est pas forcément mauvais). Tout ça mis ensemble me pose quand même question sur le "milieu" ...
- Et tu vas vivre de quoi ?
- Mais ces gens sont payés ! Et puis il y a la pub.
- Et qui paie ces gens ?
- Ah ça, je ne sais pas.
- Et en plus de ce "travail" tu vas donner cours à ton fils tous les jours pendant 2,3 heures, alors que tu n'as jamais réussi à lui faire faire le moindre devoir ou la moindre révision depuis qu'il est à l'école ? La seule chose que tu réussi à obtenir, c'est qu'il se lave et encore, tu dois te battre pour y arriver ! Qu'est-ce qui te fait dire que maintenant tu vas réussir ? Qu'est-ce que tu vas faire s'il te répond comme il le fait pour tout : "J'ai pas envie !" ? Tu pourrais au moins faire un test préalable !
- Je serai bien obligée ! De toute façon, je trouverais une solution.
- Par exemple ?
- La maman de X a retiré son fils de l'école et a trouvé une gentille institutrice qui va lui donner cours quelques heures par semaine."
- Gratuitement ?
- Ben non !
- Et quelques heures vont suffire ? (L'enfant en question est HP alors que Picolo ne l'est pas et est assez lent.)
- Tu sais, l'apprentissage de la vie n'est pas que scolaire. Je vais l'impliquer dans ce que je ferai.
- N'empêche qu'il existe une obligation d'enseignement, un programme et des examens à réussir.
- Je sais.
- Tu vas l'isoler complètement. Il n'aura plus de vie sociale, plus de copains.
- Mais si, je vais l'inscrire au sport.
- Jusqu'à présent, toutes les activités auxquelles tu l'as inscrite en déployant des trésors de persuasion n'ont pas duré.
- ...
Je ne sais plus à quel moment j'ai senti une colère monter en moi. Je me suis vue la planter là avec son délire. Heureusement, je me suis reprise.
- Toi qui as toujours eu besoin de monde autour de toi, de collègues, d'une équipe, tu vas t'isoler avec Picolo. 24h/24. Tu ne vas plus le supporter ! (C'était déjà le cas à certains moments)
- Oh mais maintenant que j'ai fait l'expérience du confinement, ça ne me fait plus peur. De toute façon, c'est quoi les collègues ? On rigole un peu, hi hi hi, ha ha ha ! C'est rien du tout ! Et ce mois de congé, ça s'est très bien passé avec Picolo !
- Ben oui, il faisait ce qu'il voulait quand il voulait et toi aussi. Mais ça ce n'est pas la vie ...
Quand nous sommes partis, j'étais calme ... en surface. Je lui ai demandé de réfléchir aux points que j'avais soulevés. On devait passer déposer quelque chose chez mon autre fille. Comme j'avais les chiens, qu'ils sont âgés et tout petits et qu'elle a 2 grands chiens, gentils, mais sauvages, les miens sont restés dans la voiture avec mon mari. J'ai raconté en 2 phrases ce que sa sœur projetait. Elle l'a traité de folle ! Son fils n'en revenait pas non plus d'un tel programme. Le lendemain, elle me téléphone pour voir s'il y avait moyen de mettre au point une stratégie qui pourrait faire retrouver ses esprits à ma fille aînée. Mais je ne savais pas quoi faire. Elle non plus.
Cet après-midi, elle me recontacte. Elle a parlé à sa sœur qui lui a avoué ne pas s'être sentie bien suite à ma réaction virulente à laquelle elle ne s'attendait pas. La cadette, qui d'habitude ne mâche pas ses mots, a réussi à la faire réfléchir au fait que son projet (qu'elle n'a diplomatiquement pas remis en cause) n'était pas au point. Elle lui a suggéré de mettre Picolo à l'école le 1er septembre et de le retirer seulement quand tout le reste serait prêt. L'aînée semblait croire que cela ne pouvait se faire qu'en début d'année scolaire, mais la cadette, qui est dans l'enseignement, lui a dit le contraire.
Un voisin et ami lui a fait le même genre d'observations.
Ma fille cadette me dit : "Tu peux être rassurée. Elle a été déstabilisée. Elle ne va pas se lancer de si tôt..."
Ma fille aînée va-t-elle apprendre à nager avant de se jeter à l'eau en entraînant son fils qui plus est ?
19:04 Publié dans Ma fille cadette, Tiouane & Titou, Ma grande fille/Bébichon, alias Picolo | Lien permanent | Commentaires (10)
27/06/2020
je suis triste pour picolo :(
Picolo doit doubler sa quatrième année primaire. Etant donné la situation particulière du confinement et le travail que nous avons fourni par skype, lui et moi, pendant 7 semaines, au rythme de 6 jours par semaine, j'espérais que l'école considèrerait qu'il peut passer en 5ème. Et bien non ! Mais le pire : il est le seul de sa classe ! Comment va-t-il ressentir les choses ? Va-t-il se sentir nul ?
Bien sûr, même si c'est dur sur le moment, même s'il perd ses copains, même s'il est le seul recalé, cela peut lui être bénéfique par la suite. Enfin, "pourrait" devrais-je dire, car selon moi il y a un gros soucis. Ma fille m'explique au téléphone toutes les raisons invoquées par le conseil de classe et le bénéfice d'un redoublement. Bien, bien ! Un moment donné elle s'exclame : "J'espère que du coup il va prendre conscience et s'y mettre." Je lui réponds que je n'y crois pas. Cette expression de "prendre conscience", elle me l'avait déjà servie il y a peu, un jour (un de plus) qu'elle en avait marre que son fils n'en fasse qu'à sa tête : "Tu vois, moi je lui explique, j'essaie toujours de lui faire prendre conscience." Aurais-je dû lui suggérer que si une même méthode pratiquée pendant 10 ans ne marchait pas, il fallait peut-être envisager d'en changer ? En tout cas, cette fois-là, je me suis tue. Et ici, elle s'exclame : "En tout cas moi, je n'ai pas le courage de me battre pour le faire travailler à la maison." J'ai pris l'habitude d'en dire le moins possible qui puisse la mettre en cause, mais là, c'est sorti tout seul : "Tu sais, si tu n'arrives pas à résoudre ce problème-là, ça n'ira jamais. Peut-être que l'année de son redoublement se passera mieux, mais dès la 5ème, il sera à nouveau perdu."
Elle s'est tue un moment. Moi : "Je suis désolée si c'est brutal, mais c'est ce que je pense." - "Oui, mais j'ai eu assez de chocs émotionnels ces derniers jours !" Un blanc. "Bon, je vais te laisser, je suis arrivée chez mon client." Je sens bien que je l'ai bousculée et qu'elle préfère arrêter la conversation. Un nouveau blanc. Elle recommence à parler quand même. Notamment de la formation psycho-motivo-machin-chose (en fait ça s'appelle "soyez extraordinaire") qu'elle suit et qui porte apparemment ses fruits. Le froid se dissipe. Nous continuons à parler encore un peu. Je l'encourage à intégrer les chocs émotionnels récents qu'elle a subis pour en faire des opportunités de travail sur soi, etc.
Voilà ! Je peux me taire souvent, mais cette fois, je n'ai pas pu. Je n'ai même pas essayé. Et je ne sais pas si c'est toujours une mauvaise chose. Parfois, l'absence de spontanéité de ma part me pèse ...
19:13 Publié dans Ma grande fille/Bébichon, alias Picolo | Lien permanent | Commentaires (11)
13/04/2020
Le poids de Picolo
En même temps que j'apprenais, au téléphone, la non implication de ma fille dans le travail scolaire demandé à son fils, elle me racontait aussi qu'il grossissait. Pourtant il ne mangeait pas beaucoup, disait-elle, "supposant" que ça devait être à cause du chocolat. D'ailleurs, elle le lui avait dit : "Loulou, tu devrais faire attention à ce que tu manges car tu commences à grossir !" Comment ça !? À 9 ans, c'est lui tout seul qui devrait gérer son poids, alors que l'armoire aux friandises est archi pleine et en libre service ? C'est elle qui fait les courses, ils sont confinés ensemble, et elle ne sait pas combien il mange de chocolat ? Tout ça, je le pense, mais je reste silencieuse. Alors, elle rajoute : "Ou alors, c'est sa constitution qui est comme ça. Ça arrive hein !" Je déglutis, j'y crois pas, mais je reste stoïque.
Est-ce qu'elle pense vraiment ce qu'elle dit ? J'en doute. Et c'est ça qui m'énerve le plus. Est-ce de la mauvaise foi ou du déni ? Alors, j'entends Blanche qui me murmure à l'oreille : "C'est sûr qu'elle a une vraie difficulté à supporter la moindre frustration de son fils." Et là je me rappelle que ce problème pourrit la vie de ma fille et qu'elle se dépatouille comme elle peut. Et ma compassion refait surface, balayant mes critiques, se substituant même partiellement (ou momentanément) à mon angoisse pour la santé de son fils. Et quand Blanche me dit :"Vous ne croyez pas qu'elle sait très bien ce qu'il en est ?", une réponse surgit spontanément dans ma tête, sans que j'aie même à y réfléchir : "Mais oui, je suis sûre que dans son for intérieur, elle n'est pas persuadée d'être sur la bonne voie. Et si elle le nie, qu'elle fait semblant d'y croire, qu'elle se vante parfois de son éducation "bienveillante", c'est peut-être qu'elle craint mon jugement ? Alors je me rappelle qu'elle n'arrive tout simplement pas à faire autrement. Et ma colère s'en va, faisant place à l'empathie ...
L'empathie est un sentiment bien plus agréable à ressentir que la colère, le jugement, la critique ...
Je crois que c'est Neale Donald Walsch qui écrit dans Conversation avec Dieu, qu'il n'existe que deux émotions primaires : la peur et l'amour. Il me semble que c'est bien ce que je décris dans cette note.
18:32 Publié dans Ma grande fille/Bébichon, alias Picolo | Lien permanent | Commentaires (15)