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29/06/2022

Un reste de traumatisme

Quand ma fille aînée m'a déclaré qu'elle avait arrêté de regarder des vidéos complotistes, je n'en suis pas revenue. C'était le 18 mars de cette année. Je suis restée sur le qui-vive pendant quelque temps. Surtout que j'avais remarqué chez elle un petit carnet de notes resté ouvert. Elle y avait inscrit des informations concernant Hitler. Ça m'a fait un peu peur, sachant ce qu'elle disait à propos de Trump d'abord, de Poutine ensuite. Allait-elle cautionner les actions d'Hitler ?

Puis, le temps passant, ma fille reprenant une vie "normale", je me suis calmée. Il s'est alors passé un phénomène interpellant pour moi. Comme je ne recevais plus de vidéos que je m'efforçais d'analyser, plus de propos à vérifier, j'ai fini par ressentir une sorte de vide. Un manque même ! Quand j'ai expliqué ça à mon mari, il a été surpris, mais ça l'a fait rire. Il est vrai que je le lui avais dit sur un ton léger, sans dramatisation. Bien sûr, je n'avais pas arrêté de vivre pour moi pendant ces 2 années et demie et j'avais la chance de pouvoir discuter longuement avec mon mari de tous les échanges que j'avais avec ma fille.  Mais un grand pan de mon esprit était occupé par ce qui se passait dans celui de ma fille. Pendant que je me promenais, jardinais, faisais des courses, la vaisselle, n'importe quoi ...

Cette sensation de vide a fini par se dissiper. Seul est resté un certain état de vigilance. Je crois que je suis encore marquée. Je remarque par exemple que je ne vois plus ma fille de la même façon. Quand je revois sa vie, j'ai maintenant le sentiment que ce retour à la normale n'est qu'une pause avant une prochaine obsession. Ou faut-il l'appeler délire ? S'il s'agit d'un trouble psychiatrique, va-t-il s'aggraver ? Il y en a quelques-uns dans ma famille, du côté de ma mère. Y a-t-il quelque chose qui se transmet de génération en génération ? Si c'est le cas, y a-t-il une démarche à entreprendre pour que ça s'arrête ? Ou faut-il simplement attendre et voir venir ?

09/06/2022

L'après

Comment les choses évoluent-elles ? Ma fille est-elle rentrée dans le rang ? Revient-elle sur ses croyances pas si lointaines ? Et moi, comment je vois tout ça maintenant, avec un peu de recul ?

Je ne l'interroge jamais à ce sujet. Je n'y fais aucune allusion. Mais parfois, le thème se glisse fortuitement dans la conversation.

Par exemple, le 11 avril, quand elle parlait de son voisin qui l'évitait soigneusement parce qu'elle le "saoulait" avec ses histoires de complots. Alors que précédemment elle s'entendait super bien avec lui. Selon elle, rien ne justifiait qu'il la traite de cette manière. S'il en avait marre de son discours, il n'avait qu'à lui demander de ne plus en parler. J'ai réagi en disant qu'à une époque, elle était incapable de ne pas aborder le sujet. Elle m'a rétorqué : "Avec toi ! Mais avec lui je me serais tue. Puis elle rajoute : "Mais de toute façon, tu me relançais tout le temps." Je n'ai pas réagi sur le moment. Nous étions en famille et je ne voulais pas risquer de pourrir l'ambiance en m'engageant sur cette pente glissante. Par contre, je lui ai écrit un mail par la suite en lui faisant remarquer que jamais je ne l'ai relancée. Je me suis contentée de réagir à ce qu'elle m'envoyait. Ce à quoi elle n'a pas répondu. C'était une constante d'ailleurs pendant toute cette période. Elle avançait une théorie. Je la remettais en question. Et le plus souvent, les choses en restaient là.

Le 24 avril, c'est elle qui en a parlé. Elle disait que toute cette époque était vraiment celle des fake news en tout genre. Dans le contexte, le "en tout genre" est important car c'est la façon dont elle explique sa nouvelle attitude. C'est-à-dire que tout, absolument tout est susceptible d'être faux. Je lui ai demandé si ça ne l'avait quand même pas fait douter de ses certitudes. Elle ne m'a répondu ni oui ni non : "C'est plutôt que ça ne sert à rien de s'informer puisqu'on ne saura jamais où est la vérité. Je lui fais remarquer qu'elle passe d'un extrême à l'autre. Elle acquiesce : "Je sais, je suis bizarre." Je n'insiste pas. Sans doute est-ce trop dur pour elle de se remettre en question. Ne m'avait-elle pas dit un jour que si "la" vérité éclatait, au moins elle saurait qu'elle n'était pas folle. Comme aucune vérité n'a éclaté, elle devrait admettre son erreur, ce qui serait pour elle l'équivalent d'admettre sa folie.

C'est peut-être du déni. À moins que ce ne soit qu'une façon de sauver la face consciemment par rapport à nous. En tout cas, moi, je ne vais pas la pousser. Elle va mieux et a repris une vie normale. On est tranquille pour quelque temps j'espère.

03/06/2022

L'humour de Marcel

Marcel, mon copain de la maison de retraite, est quelqu'un de positif. Il aime chanter. Il aime rire. Il fait de l'humour. Et pourtant, quand je lui raconte les blagues qui paraissent dans la revue de la résidence, il ne rit jamais. Par exemple :

Moi : "Ça, c'est la page des blagues, mais toi elles ne te font jamais rire. Ce n'est donc pas la peine que je te les raconte."

Marcel : "Si, si, parfois je ris."

Moi : "OK, on va voir. C'est l'histoire d'un flic qui interpelle un cycliste :

- Dites-donc, mon gars, votre vélo a pas mal de problèmes. Vos freins ne fonctionnent pas, votre phare ne s'allume pas et votre sonnette est cassée. Ça va vous coûter 25 € !

- D'accord, répond le cycliste. Mais alors, il faudra qu'il soit prêt pour demain."

Marcel me regarde, perplexe, attendant peut-être la suite ? Je lui explique le malentendu. Il hausse les épaules, dépité. Je ne sais jamais s'il ne comprend pas la blague ou si tout simplement il ne la trouve pas drôle.

Moi par contre, je ris 2 fois. Une fois pour la blague. Une deuxième fois en voyant la tête déconfite de Marcel.