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03/09/2016

Ma petite Syrienne

Non, mon Syrien n'a ni rétréci ni changé de sexe. Il s'agit d'une nouvelle tutelle. Je ne comptais en principe pas en prendre une deuxième si tôt. Je voulais d'abord être sûre de bien m'en sortir avec la première. Mais le service est tellement en manque de tuteurs qu'ils ont un peu insisté. C'était la même commune et aucune démarche urgente n'était à entreprendre, la plupart des choses étaient déjà organisées. Étant donné que mon Syrien actuel aura 18 ans le 1er janvier 2017, il sera majeur et mon rôle prendra fin. Il devra se débrouiller tout seul, ce à quoi je suis sensée le préparer.

Donc, un peu stressée quand même, j'ai accepté ce dossier. Et j'ai été contente d'apprendre que cette fois c'était une petite fille de 12 ans. Son père est mort et sa mère a disparu. Je l'ai rencontrée. Elle est toute timide et ne dit mot, en tout cas en présence de son oncle chez qui elle habite avec sa tante et leurs enfants en bas âge. Ses yeux semblaient fatigués et quasi prêts à pleurer. Je pense qu'elle était impressionnée par cette réunion. La pièce où j'ai été reçue était encore plus pauvre que celle de mon petit gars. Une télé et quelques carpettes pour s'asseoir. Rien d'autre. À la guerre comme à la guerre, je me suis assise, les jambes pliées devant moi. Pour la souplesse, je n'ai pas encore trop à me plaindre. Ce n'est que lors du "relevage" que j'ai senti le poids des ans. Ouch ! la douleur dans mes chevilles ! Elles étaient restées tendues, appuyées à plat sur le sol ! Heureusement, le temps de remettre mes chaussures (oui, on se déchausse chez eux), cela faisait déjà moins mal et j'ai pu descendre normalement les escaliers.

Je suis allée à son école, à l'heure de la rentrée des classes. Quand elle m'a vue et que je lui ai fait un petit signe amical de la main, elle m'a gratifiée d'un charmant sourire. J'ai eu l'impression qu'elle s'était avancée pour me faire la bise. Trop tard, je lui avais déjà tendu la main. Je lui ai souhaité bonne chance et lui ai expliqué, par l'intermédiaire d'un voisin qui l'accompagnait, que je venais me présenter à son institutrice. Elle n'est scolarisée que depuis le mois d'avril et ne comprend pas encore grand-chose. Le problème pour l'apprentissage de la langue, c'est que ces enfants parlent arabe en famille. Et même à l'école, ils se retrouvent entre eux et parlent leur langue. C'est compréhensible, mais ça ne favorise pas l'apprentissage du français. Dans la file, parmi tous les enfants qu'il fallait diriger un à un vers l'institutrice ad hoc, elle s'est encore tournée plusieurs fois vers moi. Chaque fois, elle m'a souri. Quand je suis partie, je ne lui ai plus serré la main, je lui ai fait la bise.

Un heureux hasard fait que l'école où j'ai inscrit mon jeune homme est juste en face, dans la rue perpendiculaire. Et leurs habitations respectives se trouvent à 10 minutes à pied l'une de l'autre. Si je m'organise bien, je pourrai aller les voir le même jour en ne me déplaçant donc qu'une seule fois. Bon exercice car moi et l'organisation, ça fait deux !